« La France vit la crise agricole la plus grave depuis 30 ans et il est désormais temps de se poser la question de sa survie. Car, aujourd’hui, l’agriculture a le même statut que l’industrie : elle est délocalisable. » Déclaration de Bruno Le Maire, Ministre de l’agriculture, le 17 décembre 2009 au micro de France Inter. Épandage de lait dans les champs en Normandie, déversement de fruits devant les Préfectures du Vaucluse et du Lot et Garonne, manifestation de bergers dans les Alpes, distribution gratuite de fruits à Paris, défilé de tracteurs à Bruxelles… Depuis un an, le monde agricole gronde d’une colère que rien ne semble apaiser. En ligne de mire, la réforme de la politique agricole de l’Union Européenne. Pendant 30 ans, la PAC a organisé le marché européen grâce aux quotas, exigeant en contrepartie des agriculteurs une mise aux normes sanitaires toujours plus exigeantes de leurs installations. Les agriculteurs et les éleveurs n’ont alors pas hésité à contracter des prêts très importants pour réaliser les travaux nécessaires et orienter leur exploitation pour répondre aux cahiers des charges de l’UE. Leur production s’est spécialisée et s’est intensifiée grâce à l’utilisation de produits chimiques certifiant à la fois un rendement important et une protection contre les maladies. Les produits ainsi calibrés trouvaient un débouché naturel dans les centrales d’achats des hypermarchés. Or, la réforme de la politique agricole commune, avec l’abandon progressif de la politique des quotas, va détruire tout l’édifice. Les producteurs voient chaque mois leur revenu diminuer du fait de l’ouverture des marchés à la concurrence alors que les traites de leur emprunt continuent de courir. Le nœud autour du cou de l’agriculteur se resserre doucement, mais sûrement. Il leur faut pourtant plus d’oxygène et de vitalité que jamais pour imaginer un autre avenir. Un avenir qui se dessine souvent par un retour à la terre. Pour ne pas être laminés par les nouvelles concurrences, les producteurs français n’ont plus vraiment le choix. Il leur faut abandonner cette « agriculture de supermarché » pour privilégier la qualité, le bio et les circuits courts. Or, en France, il existe un territoire où cette mutation a pris de l’avance : l’Ardèche. Coincé entre les contreforts du Massif central et le Rhône, le département n’a de toute façon pas vraiment eu les moyens de verser dans l’exploitation intensive. Résultat, pendant les grandes années de la PAC, ses campagnes se sont progressivement vidées. Aujourd’hui, c’est autour de la transmission de la terre que se dessine un avenir potentiel pour les jeunes exploitants. Entre la professionnalisation des exploitations et l’héritage d’une filiation qui marquait l’appartenance à la terre comme une façon d’être, il y a un nouveau défi à relever pour faire perdurer la vie des campagnes.